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Les Echos

– le 17 juillet 2020 

Les avis sur le télétravail se suivent et ne se ressemblent pas.
Après une première période post déconfinement lors de laquelle les communicants et responsables des ressources humaines de grands groupes, ont rivalisé d’annonces dans une course au tout télétravail : passant de « l’exception à la règle » chez PSA ou marquant la volonté chez Facebook d’être l’entreprise « la plus en avance sur le télétravail » ; des voix dissonantes apparaissent depuis quelques jours pour vanter les mérites d’un retour dans les bureaux synonyme d’énergie, d’équipe et de culture d’entreprise partagée. La nouvelle « normalité » du travail sera-t-elle un simple retour au mois de février ou une projection dans un futur digitalisée et distancié ?

L’évidence d’abord. La majorité des entreprises a réalisé un exploit. Alors que le monde s’arrêtait, elles ont permis, en s’organisant sous la contrainte et en quelques jours, à des millions de salariés de télétravailler et de continuer à être productifs. Cette bascule s’est accompagnée de résultats significatifs : absorption d’une charge de travail importante, engagement fort des équipes, services clients maintenus, solutions innovantes pour préserver l’activité.

Fort de ce constat sur la performance et la résilience des salariés, auquel s’ajoute des enquêtes indiquant qu’une majorité de français souhaite rester en télétravail (plus de la moitié des personnes l’ayant expérimenté), les entreprises ont voulu se précipiter sur l’occasion. Les gains potentiels ont été peu évoqués mais ils sont, dans un contexte économique très difficile, des accélérateurs de choix : réduction des mètres carrés de bureau, capacités de restauration collective diminuées ou baisse des frais kilométriques ou de remboursement de transports collectifs.

Le télétravail a donc été perçu comme la panacée, permettant tout à la fois de travailler sa marque employeur, agrandir son bassin d’emploi tout en réduisant les coûts de façon drastique.

Mais à y regarder de plus près, le télétravail n’est pas la solution absolue aux problèmes du moment.

Les différentes enquêtes et études de ces dernières semaines semblent montrer que le vécu personnel des salariés n’est pas toujours aussi radieux dans l’intimité : intrusion du monde professionnel dans la vie personnelle, difficultés de concentration dans un environnement personnel non dédié à la pratique professionnelle, fatigue psychologique, micro-management et manque complet d’autonomie pour certains ou sentiment d’être uniquement évalué sur des taches et non plus sur une posture et un comportement global pour d’autres.

Pour toutes ces raisons, nombreux sont les collaborateurs qui souhaitent retourner dans leurs bureaux pour retrouver un lien social, des échanges interpersonnels ou le « off » (tout ce que l’on ne se dit pas dans une réunion formelle) qui fait également la vie de bureau et permet d’animer un collectif.

Pour l’entreprise, les décisions rapides prises pendant la période de confinement sont souvent synonymes de risques sur les systèmes d’informations, les données des clients ou les contraintes des différents régulateurs et ne peuvent perdurer. Sur le plan interne, le fait de traiter différemment les équipes à distance, des équipes « terrain » créé une fracture au sein de l’entreprise entre ceux qui vont « au front » et ceux qui ont la possibilité de rester chez eux, qui ne peut également subsister dans le temps.

Alors que choisir ? A n’en pas douter, la situation d’avant la crise ne reviendra pas à l’identique et les mois à venir vont montrer qu’il faut savoir trouver un équilibre, mixant une présence physique qui permet d’animer un esprit d’entreprise, un collectif ; tout en permettant un travail à distance (chez soi ou dans des bureaux déportés) qui favorise l’autonomie et la concentration.

Ce que l’on peut tenir pour sur : ces choix devront se faire au plus près du terrain et de la volonté des équipes qui auront plus que jamais leur mot à dire. Et, sous peine de rendre les entreprises très rapidement obsolètes, ces choix devront se faire vite !

Par Julien Borderie, Partner chez Square.

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