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Les stablecoins dans nos paiements quotidiens deviendront-ils réalité?

L’Echo Belgium

– 23 septembre 2025

Derrière l’engouement institutionnel pour les stablecoins, une question simple persiste: offrent-ils des avantages tangibles aux citoyens européens? 

Avec l’entrée en vigueur de la réglementation MiCA en Europe et du Genius Act aux États-Unis, les cryptoactifs — et plus particulièrement les stablecoins, ces monnaies numériques adossées à une devise — disposent désormais d’un cadre légal des deux côtés de l’Atlantique. Contrairement aux cryptoactifs spéculatifs, les stablecoins se positionnent davantage comme un moyen de paiement, ce qui attire des acteurs bancaires européens plus traditionnels tels que la Société Générale, la Deutsche Bank, Banco Santander ou encore KBC. Au cours des douze derniers mois, le nombre d’émissions de stablecoins a tout simplement triplé, et ce n’est qu’un début.

Du côté de l’acquisition, le secteur évolue rapidement également, à l’instar de la plateforme marchande Stripe qui annonce l’intégration prochaine du paiement en USDC sur Shopify, y compris en Europe.

Ces signaux préfigurent l’arrivée des stablecoins dans nos usages quotidiens. Pourtant, une question demeure : qu’apportent-ils réellement au grand public ?

Des promesses séduisantes mais relatives

Les promoteurs des stablecoins avancent quatre arguments : rapidité, coût réduit, protection contre l’inflation et facilité des paiements internationaux. Ces qualités, bien que réelles, doivent être relativisées.

La rapidité d’exécution d’une transaction peut se faire en quelques secondes selon la blockchain utilisée. Mais en Europe, les virements en euros seront bientôt exécutés en moins de dix secondes, 24 h/24 et 7 j/7, et des solutions tout aussi performantes existent déjà pour les paiements hors zone euro. Même si la blockchain devenait plus rapide, l’écart resterait marginal et ne répondrait qu’à des besoins rares.

Le faible coût des paiements est un autre argument peu pertinent. Pour le consommateur européen, le coût direct d’un paiement par carte ou virement est nul. Les entreprises supportent certes des frais plus élevés, mais davantage liés aux politiques tarifaires bancaires qu’aux technologies elles-mêmes.

Par ailleurs, les fournisseurs de services crypto ne se privent pas de prélever des commissions lors des diverses opérations (frais d’acquisition, frais de conversion fiat, etc.), ce qui engendre pour les marchands un coût final comparable à celui des autres moyens de paiement.

Quant à la protection contre l’inflation, elle concerne peu l’Europe, où la moyenne d’inflation sur dix ans est de 2,38 %, et où la parité euro/dollar est restée relativement stable (du moins jusqu’au début de cette année).

Les stablecoins offrent des solutions, mais…

Enfin, concernant les transactions internationales, les stablecoins, surtout associés à des smart contracts, peuvent effectivement offrir des avantages techniques.

Mais ces cas d’usage restent marginaux pour les particuliers, et les entreprises disposent déjà de nombreuses alternatives. Les stablecoins offrent des solutions, mais ils ne sont pas les seuls.

En conclusion, les stablecoins sont un concept intéressant, susceptibles d’apporter des solutions crédibles à des cas d’usages spécifiques.

Cependant, leur intérêt dépend fortement des infrastructures de paiement disponibles et de la nature des acteurs impliqués : forte pour les entreprises, les banques centrales ou les consommateurs de pays inflationnistes, nettement plus faible pour le consommateur européen.

Une utilité limitée pour le consommateur européen

L’intérêt est d’autant plus faible que peu de jetons sont adossés à l’euro. Le risque de change s’ajoute donc aux risques intrinsèques de ces actifs privés, certes régulés, mais qui n’offrent pas autant de garanties que les systèmes classiques de monnaie scripturale.

Pour autant, les actifs numériques stables vont continuer à croître de manière significative dans nos écosystèmes de paiements, pour le meilleur comme pour le pire.

Pour éviter les dérapages, il est indispensable d’objectiver et de contextualiser le narratif autour de ces stablecoins, de combler le vide qui sépare encore la réglementation MiCA de la future DSP3, de privilégier les adossements à l’euro et de ne pas oublier que particuliers et entreprises ont déjà accès à de nombreuses solutions de paiement susceptibles de répondre à leurs besoins actuels.

Par GeoffreyLaloux, Principal et Sponsor du domaine d’excellence Payments chez Square Management.

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