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Finyear

– le 29 juin 2022

Dans la course à l’adaptation aux transformations, certaines entreprises se trouvent contraintes de suivre la dynamique du marché et de répondre aux nouveaux défis sans prendre suffisamment le temps d’étudier leurs impacts et de mesurer leur intérêt réel. Cela s’applique de plus en plus à des transformations telles que la digitalisation, le big data, l’intelligence artificielle, ou encore la cybersécurité.

Force est de constater que certaines organisations se lancent dans ces projets pour survivre face à une concurrence accrue ou tout simplement pour consommer un budget déjà alloué. Or, souvent, cette dynamique n’est ni nécessairement alignée avec la stratégie de l’entreprise ni avec sa vision sur le long terme.

Contraintes de suivre vite et de s’adapter rapidement, les organisations mettent en place des nouveaux services et produits avec un pilotage essentiellement à vocation opérationnelle, centré sur la supervision et le suivi des coûts, délais et qualité. Néanmoins, nous observons une rupture entre les décideurs des programmes de transformation et les entités opérationnelles qui les déploient et qui font face aux attentes des différentes parties prenantes. Alors comment assurer le pilotage d’une transformation efficace, durable et alignée avec la stratégie de l’entreprise ?

Une des réponses que nous apportons à ce questionnement est celle d’introduire la notion de « valeur » au cœur des modèles de pilotage des transformations et de sensibiliser les collaborateurs à leurs enjeux.
Focalisons-nous tout d’abord sur la définition de la notion de « valeur » et ce qu’elle peut représenter au cœur des projets et des équipes.

La « valeur » d’un projet : entre les gains et l’humain

Lorsqu’il s’agit d’un projet ou d’un service, la notion de « valeur » prend trois formes différentes. La première est la valeur économique ou les conséquences financières telles que la baisse des dépenses, l’augmentation du chiffre d’affaires ou l’amélioration de la productivité. La deuxième forme, appelée aussi la « valeur d’usage », renvoie à ce qu’un projet ou un service rapporte aux collaborateurs, en termes d’utilité et d’attractivité, ou aux clients en termes de fluidité de parcours et de richesse fonctionnelle. Enfin, la valeur « intangible » se traduit par les conséquences non quantifiables d’un projet, telles que les conséquences sociales sur le capital humain ou les conséquences sociétales ou environnementales au sein de l’organisation.

Rappelons que la fonction de pilotage est souvent reléguée à une simple finalité de suivi intégrée tardivement dans le processus de transformation. Face aux nouveaux défis organisationnels, il nous semble urgent de repenser à la fois la visée des modèles de pilotage et le moment de leur déploiement. En effet, l’efficacité d’un service ou d’un produit dépend fortement de sa valeur créée. Par conséquent, les modèles de pilotage nécessitent d’être centrés sur la maximisation de la création des trois formes valeur et l’optimisation de leur répartition au sein de l’organisation. En ce sens, afin de prendre des décisions optimales, nous recommandons fortement d’intégrer le pilotage par la valeur, en amont, dans les réflexions stratégiques.

Le pilotage des transformations par la valeur : une culture à développer

Chaque organisation est invitée à définir son propre modèle de pilotage, en fonction de sa vision, ses objectifs stratégiques, ses forces et ses faiblesses. Elle peut s’appuyer sur les nombreuses pratiques de management existantes centrées sur la notion de « valeur ». Mais le déploiement de ces pratiques ne sera pas effectif si les collaborateurs ne sont pas sensibilisés en amont à la notion de valeur. Le pilotage par la valeur dépasse la gestion des projets. Il a pour objectif de concevoir une méthodologie afin de définir, suivre et formaliser la valeur livrée par les projet lancés. Le pilotage par la valeur vise à optimiser la valeur créée par chaque projet, sous différentes formes et à différents niveaux : retour sur investissement, time to market, gestion et optimisation des risques, amélioration de la relation avec ses fournisseurs, etc. Il fait l’objet d’une culture collective à développer et à alimenter régulièrement, tout en impliquant l’ensemble des parties prenantes, à la fois stratégiques et opérationnelles.

Parmi les composantes clés d’un modèle réussi de pilotage de transformation par la valeur, nous citons :

  1. L’adoption d’une gouvernance globale pour accélérer la prise de décisions en impliquant les différentes parties prenantes. Il est essentiel de se doter d’outil de décision permettant d’arrêter des projets, ou d’en réduire la voilure, quand ils ne créent plus, ou peu, de valeur, pour l’organisation
  2. L’analyse des objectifs stratégiques et l’alignement avec les objectifs opérationnels et les plans d’investissement
  3. La prise en compte des risques et des contraintes sur le long et court terme et l’optimisant l’utilisation des ressources
  4. La construction d’un système de pilotage 360° de l’organisation permettant de piloter simultanément les activités « run » et « build », et d’apporter de la souplesse et de l’agilité dans la gestion du portefeuille des projets et des programmes.

La mise en place de ces éléments clés ne peut avoir lieu sans le déploiement d’une réelle culture centrée sur la valeur. En ce sens, la culture peut être développée grâce à une stratégie de sensibilisation à trois niveaux.

Le premier niveau est individuel. Il vise à changer les comportements et à répondre aux attentes des collaborateurs en termes de pilotage. Le deuxième niveau est collectif. Il vise les modalités de prises de décision et les méthodes de travail en équipe. Enfin, le troisième niveau est stratégique. Il doit être porté par la direction et repose sur l’adoption d’un discours formel et d’un récit collectif autour des trois formes de « valeur » et de la nécessité du pilotage.

Nous observons depuis 2016, une évolution des modèles de pilotage au sein des entreprises. Le secteur bancaire et plus précisément les banques d’investissement étaient les pionnières en termes d’acculturation de collaborateurs au pilotage par la valeur sous ces trois formes. Depuis, les textes de loi et les contraintes réglementaires ont contribué à renforcer cette dynamique dans d’autres secteurs d’activité.

En conclusion, appliquer une démarche de pilotage par la valeur apparaît comme une solution pour une transformation réussie, notamment au sein des grandes structures. Cette démarche, qui reste évolutive, s’appuie essentiellement sur la création et la consolidation d’une culture favorisant la confiance, la responsabilisation, l’autonomie, le goût de l’excellence et la quête du sens. Il est dès lors indispensable de repenser son modèle de pilotage et de se doter des moyens nécessaires pour en faire un créateur de valeur durable pour l’organisation.

Par Manel Dardouri et Adil Bezzar, Consultante et Principal Square.

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