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Le courrier financier

– le 29 novembre 2021

La crise des subprimes de 2007 suivie de la crise bancaire et financière de l’automne 2008 ont révélé des lacunes dans le système bancaire mondial. Ces événements ont conduit les autorités protectrices de ce système à élaborer des mesures efficaces destinées à sauver les banques en phase de faire faillite.

Ecosystème bancaire et principe de résolution

La directive relative au redressement des banques et à la résolution de leurs défaillances Bank Recovery and Resolution Directive (BRRD), entrée en vigueur en 2015, envisage deux solutions lorsque ces mesures préventives ou d’actions rapides s’avèrent insuffisantes pour sauver une banque : la liquidation ou la résolution. La résolution est privilégiée, car elle garantit la continuité des fonctions essentielles de l’entité en crise et protège les déposants par d’autres moyens que le recours à l’intervention de l’Etat.

En 2007, la France, le Luxembourg et la Belgique ont tenté de remettre sur pied la banque Belge Dexia en débloquant une enveloppe d’environ 100 milliards d’euros suite à sa chute causée par la crise des subprimes. Cette pratique traditionnelle est appelée le « bail-out ». Le Conseil de Résolution Unique (CRU ou SRB en anglais), dont le rôle est de garantir la résolution ordonnée des banques défaillantes avec une incidence minimale sur l’économie réelle et les finances publiques des pays de l’UE, mettra fin à cette pratique jugée trop ruineuse pour les états à la fin 2015.

C’est en 2016 que le principe de résolution verra le jour dans l’écosystème bancaire. Il contient quatre instruments tels que la cession des activités, l’établissement-relais ou bridge bank, la séparation des actifs ou bad bank et, ce qui nous intéresse le plus, le renflouement interne ou bail-in. Les banques devront dès à présent opter pour un renflouement interne plutôt que s’attendre à un renflouement externe afin de s’assurer que ce soient leurs actionnaires, créanciers et gros épargnants (dépôts supérieurs à 100.000 euros) qui participent à la reconstitution de leurs fonds propres supportant ainsi les pertes éventuelles, et non les Etats. Le CRU favorise donc cette logique de « bail-in », plus moralisatrice pour les banques. 

Mécanisme de résolution unique (MRU)

Le mécanisme de résolution unique permet d’établir une résolution ordonnée des défaillances des banques en affectant le moins possible le contribuable. Il est constitué du CRU son principal organe décisionnel et du fonds de résolution unique ou FRU, financé par le secteur bancaire.

Son but est de faire régner un climat de confiance dans le secteur bancaire et d’atténuer au maximum la spirale négative que peut engendrer les moments de crise. Son fonctionnement se déroule sous plusieurs étapes. Tout d’abord, la Banque centrale européenne intervient en tant qu’autorité de surveillance pour avertir le CRU de la défaillance d’une banque. Le CRU à son tour, juge de la nécessité de résoudre ou non la banque.

Deux options se présentent : la banque ne remplit pas les conditions de résolution et elle est directement liquidée conformément aux exigences du droit national ou au contraire, elle remplit les conditions et dans ce cas, le CRU adopte un dispositif de résolution. Le dispositif de résolution sera transmis immédiatement à la Commission européenne pour validation et entrera en vigueur 24 heures après son adoption par le CRU.

Le budget de résolution : ratios prudentiels MREL et TLAC

Une fois qu’une banque est éligible à la résolution, elle doit structurer ses comptes et donc prévoir dans un premier temps de la liquidité pour faire face à sa potentielle faillite mais aussi de la liquidité qui va permettre sa recapitalisation post crash. Pour cela, elle doit prendre en compte les ratios prudentiels TLAC (Total Loss-Absorbing Capacity) et MREL (Minimum Requirement for own funds and Eligible Liabilities). Le TLAC est un ratio permettant de s’assurer que les banques d’importance systémique internationales (G‑SIB) disposent d’instruments financiers nécessaires à leur résolution. Le MREL poursuit le même objectif au niveau européen.

Le but ultime de la réglementation est de permettre aux banques d’améliorer d’une part la qualité de leurs fonds propres ou Common Equity Tier 1 pour permettre la continuité d’activité et d’autre part de doubler le niveau de leurs fonds propres en volume, mais pas en composition car les passifs éligibles pour la recapitalisation s’avèrent être moins contraignants que les fonds propres. Il faut noter que toutes banques en mesure d’être résolue doit être en capacité de produire en une journée son Liability Data Report, reporting apportant une vision exhaustive et claire de son passif. Sur la base de ce reporting, le CRU doit pouvoir opérer une résolution en un weekend pour éviter d’affoler les marchés. 

Pour finir, même si les établissements de crédit parviennent à se renflouer après une crise via les outils de résolution et le respect des ratios prudentiels, subsiste toujours la difficulté majeure que représentent la confiance des ménages et leur défiance à confier à nouveau de l’argent à une banque ayant fait faillite. Cependant, au vu du caractère systémique des banques à résoudre, c’est-à-dire banque avec un impact trop important sur l’économie pour que la faillite soit ignorée par le gouvernement, ne pouvons-nous pas imaginer que les états soient encore contraints d’une manière ou d’une autre pour assurer la relance de l’activité de l’entité post-crise ? 

Par Yann Balliet, project manager chez Square.
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